Suite à une rupture douloureuse, un jeune Italien installé à Paris s’inscrit, sur le conseil d’une ancienne maîtresse, sur un site de rencontres fondées sur les affinités culturelles. Il va découvrir une sorte d’univers parallèle, où la prétention intellectuelle est de mise et dont il sera vite le prisonnier. Entre un rendez-vous foireux et une lettre nostalgique de son ex, une citation pertinente de Crevel et une gorgée de vodka, une critique lapidaire de son pays d’origine et la succession avide des corps, un regard acerbe sur le milieu “bobo” parisien et la prise de notes éparses, une soif de séduction qui dépasse de loin celle de L’Homme qui aimait les femmes de François Truffaut et une addiction infernale proche de celle de Requiem for a dream de Selby, le narrateur restitue les impressions que cette nouvelle vie lui inspire. Il relève impitoyablement tout indice de médiocrité humaine. Il jette au visage de ses contemporains le désespoir et l’incapacité des gens à communiquer et à s’attacher, leur soif d’amour et leur atroce solitude.Mais plutôt qu’une étude “sociologique” du phénomène c’est l’histoire personnelle d’un homme qui se déroule, sous nos yeux, comme une bobine dévidée de rencontres sans lendemain. Loin de le combler, ces relations mettent en lumière sa propre misère affective. Et si chaque nouvelle rencontre est assimilée à un petit suicide, la tentation de continuer le jeu semble cependant chaque fois plus forte. Dans une langue limpide et nerveuse se succèdent des portraits de femmes crus ou poignants, des morceaux choisis, d’une lucidité grinçante ou d’un humour corrosif. Les innombrables faux profils, prothèses identitaires, sorte de double virtuel dont l’existence ne peut qu’être éphémère – fakes – dont le narrateur finira par se servir pour manipuler ses interlocutrices, achèveront d’usurper sa vraie identité. Spectateur impuissant de sa propre perdition, il sera embarqué dans une vertigineuse fuite en avant aux confins du virtuel et du réel. A la fois roman picaresque et vibrant “j’accuse” porté au système spectaculaire qui envahit désormais la sphère des sentiments, Fake est surtout une chronique politiquement déjantée du nouveau désordre amoureux.Extrait: "Au bout de trois mois d’abonnement à meetic, au prix de quatre-vingt-neuf euros et quatre-vingt-sept centimes, j’aurai rencontré trente-deux filles. Avec quatorze d’entre elles, j’aurai eu le loisir de joliment salir de foutre mes draps. En opérant une division très simple, je peux conclure que chaque fille baisée m’aura coûté – hors frais de bouche et de laverie – six euros et quarante-deux centimes d’investissement."
Né en Italie en 1972, Giulio Minghini est lecteur du français et de l’espagnol pour les éditions Adelphi. Il a traduit en italien des romans de Crevel, Pierre Mac Orlan et Simenon. Il vit à Paris. Fake est son premier roman écrit directement en français. Editions Allia
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